J’étais entier. Presque beau goss. Le bus m’a brisé et la vie m’a reconstruit.
Tu t'es souvent demandé comment je me suis fait la grosse cicatrice que j'ai sur la tête ? Viens je te raconte.
J'ai eu la chance d'être né en bonne santé et en entier. Mais un matin du 8 avril 2009, alors que je voyageais dans un bus VIP climatisé entre les villes de Yaoundé et Douala, le bus s'est renversé et je me suis réveillé totalement transformé.
Ce jour la tout a changé pour moi. Sorti du bus par de généreux passants, je me suis réveillé couché sur le trottoir dans un sale état. Le bilan était tragique. Plusieurs personnes y ont perdu la vie et des dizaines ont été blessées. En vrai, c'était une vraie boucherie.
Malgré la gravité de l'accident, j'ai eu de la chance. Même si mes blessures étaient impressionnantes parce qu'elles étaient en grande partie sur la tête elles étaient toutes "superficielles". Aucun organe vital n'avait été touché.
Le vrai challenge a commencé après mon séjour à l'hopital. J'ai passé de longs mois à l'hôpital, subi de multiples interventions chirurgicales. Mais j'étais loin d'imaginer que le plus dur serait après l'hôpital.
À l'hôpital, je n'avais pas droit au miroir, l'équipe médicale me l'avait interdit. Ce n’était pas par méchanceté. Mon reflet aurait pu me tuer plus vite que l’accident.
Une fois retourné chez moi, j'ai réellement compris pourquoi les médecins m'interdisaient le miroir. Je n'avais pas besoin de me regarder dans le miroir, mais le visage de ceux qui me regardaient en disait long sur ma transformation. Mes frères, mes sœurs, mes amis, bref tout le monde. Ils avaient beau faire semblant, leur visage les trahissait. Les gars étaient choqués.
ls ne disaient rien. Mais leurs visages criaient. J’avais changé, et eux aussi. Il m'a fallu presque deux ans et l'aide de ma mère pour réellement sortir de chez moi et quitter le chapeau que je portais systématiquement quand je sortais de la maison. Un jour ma mère m'avait dit : "Raoul, tu ne vas pas te cacher éternellement. Tu es jeune, tu es en bonne santé et tu as toute la vie devant toi. Tu dois recommencer à vivre."
Les premières sorties sans ma casquette, sans mon tchamako, ont été les expériences les plus éprouvantes de mon existence. Vrai vrai, c'était dur. Chaque regard était ressenti comme un coup.
À cet âge, on donne beaucoup d'importance à l'apparence et je n'acceptais pas ce à quoi je ressemblais.
Coup après coup, je me suis habitué et j'ai finalement appris à accepter mon nouveau moi.
Est-ce que j'avais alors le choix ? Non. La vie m'a enseigné.
Ce changement d'apparence a complètement changé ma vie. De ma manière de regarder les gens à la façon d'appréhender les problèmes. Parmi tout ceci, il m'a doté d'un "super pouvoir" inattendu : la capacité de percevoir ce que les gens taisent, ce qu’ils cachent derrière leur sourire.
J’ai aussi appris que toutes les situations de la vie nous enseignent des leçons précieuses sur nous-mêmes et notre environnement. Chaque expérience positive ou négative, a le potentiel de nous transformer et de nous renforcer. Il est essentiel de tirer parti de ces enseignements et de rediriger leur impact de manière positive dans nos vies.
Intègre ces lecons à ton identité narrative, et laisse-les te guider vers une version de toi-même plus résiliente et plus sage.
Moi mon accident ne m’a pas cassé. Il m’a ouvert les yeux. Pas sur le monde, mais sur moi-même.
Souviens-toi donc que chaque défi surmonté est une victoire qui te rapproche de la personne que tu es destiné à devenir.
Raoul MBE
PS : Avril est le mois de ma renaissance. Le mois où je célèbre un nouveau tour de vie.